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commencer le sillon vocal où toutes les bouches du chœur doivent
jeter leurs notes.
La musique religieuse n’a cessé d’être noble, digne, grave en
France, que depuis quebiues années. Des curés, à Paris et dans
quelques grandes villes, ont voulu mêler à la majestueuse sévé-
rité du chant grégorien, les pompes et les agréments de la
musique mondaine, et un orgue d’accompagnement est installé
dans le sanctuaire comme dans un orchestre de théâtre. Est-ce
un bien ? est-ce un mal ? L’art est pour nous une chose divine
dans son essence, mais toutes les applications de l’art ne sont pas
dignes de célébrer les louanges du Très-Haut.
Après la musique religieuse d’un peuple, vient sa musique
militaire. Nous savons au son de quels instruments marchaient
au combat les phalanges macédoniennes et les légions romaines ;
mais bien des gens ignorent de quels instruments se com-
posait la musique militaire de nos pères. C’est encore dans le choix
de ces instruments, qui président au carnage et à la mort vio-
lente, qu’il faut chercher le caractère primitif d’un peuple.
Les deux seuls instruments de guerre de nos ancêtres étaient
le tambour et le fifre L
Le fifre a été l’assidu compagnon de nos triomphes et de
nos revers depuis Clovis jusqu’à Napoléon. Il était à la défaite
de Siagrius, il était à Bouvines, il était à la Massoure, à Crécy,
à Poitiers, à Mons-en-Puelle, à Pavie, à Cerisolles, à Lens, à
Steenkerque, à Nerwinde, à Fontenoy, à Jemmapes, à Lodi,
à Aboukir, à Marengo, à Austerlitz, à léiia, à Montmirail, à
Champ-Aubert, à Waterloo... Pourquoi n’existe-il plus à la
tête de nos régiments? pourquoi ces arpèges aigues, ces notes
acerbes, ces sifflantes invitations à la victoire ou au trépas glo-
1 On voyait encore avant la révolution, sur un très-ancien vitrail de l’abbaye
de Sainte-Geneviève, la prise de Ptolémaïs par les Croisés, et on y distinguait par-
faitement les Français marchant ou plutôt escaladant les échelles, un fifre en tète.
Ce curieux vitrail a été brisé, comme tant d’autres objets dignes d’être conserves
au moins par orgueil national.