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longtemps dédaignée, trop longtemps exclusivement réservée à la
pâture des bestiaux, il faut que la pomme de terre devienne aussi
la nourriture de riiomme; il faut, en un mot, qu’elle apparaisse
sur la table du riche comme sur celle du pauvre, et qu’elle y occupe
le rang que sa saveur, ses qualités nutritives et la sanilé de sa
nature devraient lui avoir acquise depuis longtemps \ »
Ce mémoire produisit une sensation extraordinaire, il fut
couronné par l’Académie de Besançon, et l’auteur reçut de toutes
parts des lettres de félicitations. Buffon, Condorcet, les comtes de
Maurepas et de Saint-Florentin , le marquis d’Argens et Voltaire
lui-même écrivirent à Parmentier, et lui manifestèrent les plus
vives et les plus profondes sympathies. « Vous avez rendu à la
France un grand service, lui marquait Voltaire, en lui prouvant
qu’elle peut tripler et quadrupler les substances nécessaires à la
nourriture de ses nombreuses populations. Le vulgaire fait grand
cas , Monsieur, des brigands illustres qui désolent le monde, et
il les décore du titre de héros. Croyez-moi, Monsieur, une gloire
comme la vôtre est bien supérieure à celle de ces dévastateurs et
de ces forcenés. Vous méritez plus qu’eux lous les hommages des
peuples. Leur gloire est sanglante et entourée de ruines, la vôtre
est pure et mérite l’ovation de tous ceux qui aiment l’humanité. »
Cependant, tant et de si illustres suffrages ne suffisaient pas
pour dessiller les yeux des incrédules. Le Français, toujours léger
et superficiel, trouva, alors comme aujourd’hui, un intarrissahle
sujet de plaisanteries dans la question d’économie politique et
de haute agriculture agitée par le savant Parmentier. Celui-ci ne se
découragea point ; soutenu par quelques grands seigneurs éclairés
et entr’autres par le duc d’Orléans, il continua à écrire dans le
Mercure, dans les Annales des sociétés savantes, dans les journaux
‘ On rapporte que Parmentier invita un jour un grand nombre de ses amis à
diner chez lui, et que tous les mets du festin étaient accommodés avec des pommes
de terre; les liqueurs mêmes étaient composées avec le suc extrait du tubercule.
L’appétit des convives trouva pleinement à se satisfaire, et chacun se retira aussi
charmé du repas que surpris et enchanté de l’expérience de l’amphltrion.