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LES CHEMINS DE FER.
Les tunnels sous les montagnes, sous les fleuves. — Les voles de fer aériennes. — Le
Caucase et l’Atlas, etc.
Si Salomon de Gauss revenait au monde, il serait bien surpris
de voir cette vapeur, dont il avait rêvé le triomphe dans les caba-
nons de Bicêtre, régner en souveraine à Londres, à Paris, à
Vienne, à Berlin, à Bruxelles et à Munich, et enchaîner à son char
de fer plus d’intérêts, plus d’ambitions, plus de fortunes publiques
et privées que les trônes des monarques les plus absolus du dix-
septiême siècle. La vapeur est en effet, aujourd’hui, le grand res-
sort social ; elle a donné à la politique, à l’industrie, au commerce
les cent bras de Briarée; elle louche par mille poinls à la vie
matérielle et intellectuelle des nations; et, en effaçant les dis-
tances, en rapprochant les grands centres de population, elle nivelle
en quelque sorte les mœurs, rend les lois problématiques, confond
les pouvoirs et ébranle les nationalités. Avec la vapeur, il n’y
aura plus, dans deux ou trois cents ans, que des Européens, des
Asiatiques, des Américains, des Africains et des Océaniens. Si
les aérostats, comme le prophétisent quelques jeunes grands
hommes, parvenaient à supplanter la vapeur, ce sera bien pis
encore : il n’y aura que des citoyens du monde, et Dieu sait quels
citoyens !
Lorsque Salomon de Gauss disait impétueusement au cardinal
de Richelieu qu’il avait trouvé le secret de rendre le monde entier
tributaire de la France; quand l’Américain Fulton, cent soixante
ans après, disait à Napoléon qu’il venait lui apporter les clés de
Portsmouth et de la Tour de Londres, certes, il y avait de quoi
faire réfléchir deux hommes qui n’eussent pas eu le génie du
grand cardinal et du grand capitaine. Mais Richelieu et Napoléon,
dont la tête réglait les affaires du monde, raisonnaient par syn-
thèse et non par analyse. Richelieu ne vit dans Salomon de Gauss