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Vainement quelques écrivains qui ont le tort très-grave aux yeux
de la raison et de la philosophie, de rehausser une classe de la
société aux dépens des autres, ont voulu, dans des récits plus
ou moins fabuleux, individualiser cette utile découverte et donner
même un nom à son* premier inventeur ; il est certain que le forage
des puits artésiens est l’œuvre collective de toute une génération
d’hommes industrieux, patients, laborieux, qui consacraient à la
conquête d’un bien général et d’une richesse populaire les lueurs
ardentes d’une intelligence que les paysans, depuis celte époque,
n’ont pas toujours si utilement, ni si noblement employée. On
voit encore aujourd’hui à Libers, petite ville de l’Artois, un puits
qui y a été creusé en 1126 ; et, chose admirable ! cette fontaine,
dont le produit s’est constamment soutenu jusqu’à nos jours,
n’impose à la commune à laquelle elle rend tant de services, qu’une
minime dépense. Cette dépense consiste à remplacer tous les
vingt-cinq ans son tubage en bois, car il est bon de remarquer
ici que les tubes en bois, dont l’usage remonte à l’origine même
des puits artésiens, sont préférables sous tous les rapports aux
tubes en fer battu, en fonte de fer et en cuivre, que les ingénieurs
modernes, qui, pour se servir d’une expression vulgaire, cher-
chent toujours midi à quatorze heures, ont eu la malencon-
treuse idée d’adopter depuis que les puits artésiens sont passés
de la bonne et droite science populaire, fille du génie et de l’expé-
rience, dans la sphère nuageuse des faiseurs de systèmes, des
académiciens et des seigneurs des ponts-et-chaussées.
Bernard de Palissy, dont la haute et vaste intelligence n’est
restée étrangère à aucune tentative scientifique, s’exprime ainsi
dans un de ses ouvrages : « Toutefois, en plusieurs lieux, les
pierres sont fort tendres, et singulièrement quand elles sont encore
dans la terre; pourquoi me semble qu’une torsière (vrille) la
percerait aisément, et après la torsière on pourrait mettre l’autre
tarière et par tel moyen on pourrait trouver du terrain de marne,
voire des eaux, pour faire puits, lesquelles bien souvent pour-
raient monter plus haut que le lieu où la pointe de la tarière les