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leurs besoins, ne voient pas s’élancer, des rivages de leurs pays,
des nefs rapides chargées de pommes de terre, qui vont, sous
le pavillon cosmopolite de l’agiotage, porter sur d’autres bords,
l’abondance et la sécurité qu’elles volent impudemment à la patrie
en deuil.
Pour surcroît de maux, depuis quelques années il s’est pro-
duit des taches dans la pomme de terre comme dans le soleil.
Une analogie arcane semble exister entre le sublime généra-
teur de la nature et la constitution de l’une des plus humbles
plantes qu’il fait naître par la chaleur de ses rayons. Cette affec-
tion morbide, que la science n’a pas pu encore expliquer, a été
nommée la maladie des pommes de terre. Les Français en ont
ri, les esprits forts s’en sont peu alarmés; mais les véritables
philosophes, ceux qui ne veulent nier dans leur pieuse sagesse,
ni Dieu, ni l’impénétrable mystère de ses décrets, ont gémi de ce
déplorable phénomène, qui annonce dans l’ordre physique un
renversement pareil à celui qui existe depuis un siècle dans
l’ordre moral. La destruction des mondes comme la destruction
des sociétés, se révèle longtemps à l’avance par des prodiges
inexplicables qui sont en quelque sorte les ambassadeurs de la
colère et de la justice de Dieu.
La gratitude publique a décerné, à Antoine Parmentier, une
magnifique récompense digne de ses vertus et de son amour
pour l’Humanité. On a élevé, il y a quelques années, à Mont-
didier, sa ville natale, une statue de bronze au Christophe
Colomb de la pomme de terre. Le savant agronome est repré-
senté debout, tenant à la main le bouquet de fleurs de pa-
tates qu’il présenta à Louis XVI en 1781. Le piédestal ne
porte que cette courte inscription : à Antoine Parmentier.
Ce laconisme est de bon goût, car il est des noms si véné-
rables et si grands, que les éloges et les titres palissent devant
leur immortalité.