Merveilles du génie de l'homme : découvertes, inventions, récits, historiques, amusants et instructifs sur l'origine et l'état actuel des découvertes et inventions les plus célèbres / Par Amédée de Bast.
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qui est venu trouver Jean-Joseph; car, monsieur, on n’a pas
tardé à parler de sa charrue dans toute la contrée, comme cela
devait être. Des savants l’ont visitée et lui ont fait compliment.
Aujourd’hui mon ami n’est plus Jean-Joseph tout court, c’est un
homme de mérite, un inventeur distingué, qui a dîné avec M. le
sous-préfet et tous les personnages les plus huppés du département.
Sur l’annonce de journaux, il s’est réuni ici plus de deux mille
personnes, peut-être, pour le voir conduire ma charrue : Aujour-
d’hui, comme de raison, ce n’est plus moi, c’est lui qui a l’hon-
neur de conduire. Tout Château-Salins, tout Nancy parlera demain
de Jean-Joseph Grangé.
Cette histoire inspira au Parisien le désir de voir de près la
fameuse charrue, pour laquelle il s’était montré d’abord si sauva-
gement insouciant. Il se leva du petit tertre, non sans avoir serré
avec chaleur, en signe de reconnaissance , la main du malade ou
plutôt de l’heureux convalescent. Celui-ci ne le suivit pas; l’émo-
tion d’une telle journée l’avait un peu fatigué et le repos absolu
lui était nécessaire. Le Parisien courut se mêler à un groupe de
curieux qui devaient être des plus recommandables, à en juger par
le ruban rouge qui brillait à bon nombre de boutonnières. 11 y
avait là un homme en qui rien ne trahissait le docte savoir, bien
que sa physionomie annonçât une haute et sagace intelligence. Il
gardait le silence, tout en suivant d’un œil scrutateur la marche
et l’action du soc, le jeu des bras du laboureur, et la tension des
traits de l’attelage. On voulut connaître son opinion.
« C’est ici, dit-il, un de ces cas où la science reste confondue
et n’a plus qu’à s’incliner. Le simple ouvrier qui manie du matin
au soir le même outil, qui en démonte et en remonte à chaque
instant les pièces une à une, qui apprécie, par une expérimentation
continue, et à la sueur de son front, quelle })ièce aide le mieux à
l’action de ses bras, ou quelle autre la contrarie, sera toujours
l’homme le plus propre à perfectiouner cet outil, pour peu que son
cerveau soit capable de réflexion, et qu’une passion forte échauffe
et soutienne sa volonté. Voici un homme qui, par l’intervention