Merveilles du génie de l'homme : découvertes, inventions, récits, historiques, amusants et instructifs sur l'origine et l'état actuel des découvertes et inventions les plus célèbres / Par Amédée de Bast.
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les contrées de Tltalie se trouvèrent pourvues du légume péruvien
et les laboureurs le cultivèrent à l’envie. Le pape Innocent VIII,
ordonna, par un bref, que les terrains incultes du domaine de
Saint-Pierre seraient consacrés à la culture de la nouvelle plante
américaine; et grâce à cet ordre du Saint Père, les landes de
Forli, d’Albano et de Tibur furent ensemencées de patates qui
offrirent de nombreuses ressources à l’agriculture des Etats-
Romains.
Les ^Hollandais et les Anglais ne tardèrent pas à imiter les
Italiens. Avec ce tact et cette persévérance qui distinguent ces deux
peuples, les laboureurs de la Frise occidentale, des provinces de
Leyda et de Berg-op-Zoom, des royaumes d’Écosse et d’Irlande,
et du pays de Galles, finirent par acclimater les patates, et en
moins de dix ans, de 1506 à 1516, on vit en Hollande, en An-
gleterre et en Irlande des champs entiers réservés à la reproduction
de ce légume, qui n’était encore que la nourriture des animaux.
La guerre, qui traîne d’ordinaire après elle tant de désastres, de
ruines et de malheurs, devint, pour la première fois, vers la fin
du dix-septième siècle, l’occasion d’un bienfait immense pour la
France et pour l’humanité.
Les Anglais, pendant la guerre de Flandre, initièrent la Bel-
gique et la Flandre française, aux mérites humbles et inappréciés
de la patate ; quelques cultivateurs progressistes du temps l’adop-
tèrent et en propagèrent la culture. Bientôt, de proche en proche,
la patate se fit des prosélytes, et elle parvint enfin, après trente
ans de succès modestes et restreints aux fermes et aux métairies,
à se faire naturaliser française : on la nomma pomme de terre, et
ce nom lui est resté.
Cependant son triomphe n’était pas complet. Les provinces du
Midi lui avaient fait un bienveillant accueil ; les provinces du Nord
ne l’avaient pas négligée ; mais personne encore n’avait songé à
l’appliquer à la nourriture de l’homme, à la rendre rivale du
hlé, du maïs et du sarrazin. Les préjugés du peuple s’opposaient
à cette bienheureuse métamorphose ; on accusait la pomme de