Merveilles du génie de l'homme : découvertes, inventions, récits, historiques, amusants et instructifs sur l'origine et l'état actuel des découvertes et inventions les plus célèbres / Par Amédée de Bast.
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les danses lascives, les Ihyades échevelées, les bacchanales impies
qui remplaçaient les chastes amours d’Endymion, et les sévères mé-
lopées en marbre de Minerve et de Neptune, n’indiquaient que trop
l’approche de l’heure fatale à la Grèce. Elle ne tarda pas à sonner;
et la prédiction offerte par les arts devenus corrupteurs devenait
presque une certitude, quand on voyait les Spartiates eux-mêmes,
ces farouches citoyens, ces soldats intrépides qui avaient sauvé
tant de fois rindépendance de la Grèce, oublier leur vieille so-
briété, et, désertant les lois de Lycurgue, se livrer comme le reste
des républiques grecques, à l’esclavage des besoins les plus hon-
teux et des passions les plus basses de l’humanité : la débauche et
l’ivrognerie.
Le maître avait erré, mais avec tact, avec circonspection, avec
génie. Praxitèle avait perdu l’art, mais comme tous les grands
hommes perdent les religions, les lois, les arts, la morale, les
mœurs, avec un immense talent, avec une incomparable bonne
foi, — car il serait trop affreux pour l’humanité de croire que
ses faux guides sont des hypocrites; —mais ses aveugles, ses
fanatiques disciples imitèrent servilement ses erreurs sans pouvoir
imiter ses talents. La statuaire descendit au dernier degré de
l’abjection : ce ne fut plus des Vénus, des Cupidons, des satyres
dont les rois se disputèrent la possession‘ ; ce ne fut plus des
vainqueurs des jeux olympiques, ce ne fut plus même des
citoyens recommandables seulement par leurs richesses, — pauvre
recommandation ! — qui inspirèrent les statuaires grecs, ce furent
des courtisanes éhontées, des athlètes sans palmes, des philosophes
'■ La Vénus de Gnide, par Praxitèle, avaif une telle réputation de beauté, que
Nicomède, roi de Bithinie, offrit aux Gnidiens de les affranchir du tribut ([u’ils
lui payaient s’ils voulaient la lui donner. Les Gnidiens répondirent : « Nous vous
payerons toujours, et nous conserverons notre Vénus. » Réponse noble, géné-
reuse, qui sera assez peu comprise aujourd’hui, où des villages et des villes mêmes
donnent pour quelques sous, à de misérables juifs brocanteurs, des morceaux
précieux en bois, en pierre et en argent, de l’art bizantin et galliaque, conservés
dans nos vieilles églises; et ces brocanteurs juifs frariçais vont vendre au poids
de l’or, en Angleterre ou ailleurs, les dépouilles artistiques de la patrie, qu’ils
vendraient elle-même, si elle voulait se laisser vendre.