Merveilles du génie de l'homme : découvertes, inventions, récits, historiques, amusants et instructifs sur l'origine et l'état actuel des découvertes et inventions les plus célèbres / Par Amédée de Bast.
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homme qui avait accueilli Cromwel, qui protégeait Corneille,
qui aimait, honorait et couvrait de l’inviolabilité de sa pourpre
tout ce qui avait une grande pensée au cœur ou une vaillante
épée au bras, Richelieu prenant l’exaltation de Salomon de Caus
pour de la folie, sa bruyante démonstration pour de la fureur,
ordonna qu’il fut jeté dans un cabanon de Bicêtre. Disons qu’en
même temps des ambassadeurs étrangers, l’ambassadeur d’An-
gleterre peut-être, — car l’Anglais est toujours disposé à ruiner
la France, à amoindrir ses triomphes, à paralyser ses volontés
d’intelligence ou de guerre, — dépeignaient Salomon de Caus
au premier ministre de Louis XIII, comme un agent secret, comme
un espion de la maison d’Autriche qui voulait cacher, sous les
apparences d’une invention fabuleuse, ses menées, ses intrigues
et peut-être ses complots contre la vie du cardinal et contre la
tranquillité du royaume.
Il n’en fallait pas tant pour décider l’altier tuteur de Louis XIII
à agir avec sévérité, avec cruauté. Salomon de Caus fut traîné
dans ces affreuses gémonies, où rintelligcnce la plus vive, la plus
saine et la plus brillante finirait par s’éteindre moins par le pesan-
teur des fers que par le contact perpétuel avec des êtres dégradés.
Ce fut là, dans un de ces affreux cabanons, que le marquis de
Worcester et la courtisane Marion de Lorme aperçurent, un jour
qu’ils visitaient Bicêtre en partie de plaisir, le malheureux de
Caus, qui les supplia vainement à mains jointes et en tordant
les barreaux de sa prison, de s’intéresser à son sort.
Cette apparition et cette prière ne firent qu’une impression fugi-
tive sur la courtisane, qui, le soir, dans son gynécée de la place
Royale, ne se rappela point les deux, larmes qu’elle avait versée
devant le cachot de Salomon. Le marquis de Worcester se rendit,
lui, le lendemain, à Bicêtre, non pour briser les fers de Salomon,
mais pour voler à cette intelligence déjà faussée, à cette mémoire
lucide encore pour sa merveilleuse découverte, les derniers rayons,
les derniers reflets du génie. De ces miettes de miracle ramassées
sur la paille infecte d’un cabanon, le riche marquis de Worcester